Les dispositifs de lutte contre les discriminations sont aujourd’hui importants, même s’il faut encore les parfaire.

Publié le par Eddie AIT

Tribune publiée dans la Revue CONFLUENCES (juin 2001)

La thématique de la lutte contre les discriminations s’affirme aujourd’hui sur la scène des débats de société. Commission Européenne, ministère du Travail, Confédération Syndicale, Associations et Fédérations se mobilisent pour détruire cette banalisation du rejet de l’autre.

La thématique de la lutte contre les discriminations s’affirme aujourd’hui sur la scène des débats de société. Commission Européenne, ministère du Travail, Confédération Syndicale, Associations et Fédérations se mobilisent pour détruire cette banalisation du rejet de l’autre.

L’engagement gouvernemental s’est traduit, notamment à l’occasion des « Assises de la Citoyenneté et de la lutte contre les discriminations » du 18 mars 2000, par la mise en place d’un numéro d’appel gratuit, le 114, qui « s’attache à répondre aux situations individuelles et à faciliter la rencontre entre, d’un côté, les outils nouveaux mis en œuvre pour prévenir et traiter les cas de discrimination et, de l’autre côté, les personnes potentiellement victimes de discriminations. » [1] La question des discriminations est désormais entrée dans l’esprit des pouvoirs publics.

Et de façon générale, les dispositifs de lutte contre les discriminations ne manquent pas. Qu’il s’agisse de la Commission nationale consultative des Droits de l’homme ; du Haut Conseil à l’intégration qui, comme son nom l’indique, a pour mission d’aider à l’intégration dans la société française ; des CODAC (Commissions départementales d’accès à la citoyenneté), chargées dans chaque département d’étudier les cas de discrimination en matière d’embauche, de logements ou de loisirs ou du Groupement d’étude des discriminations [2], tous ont pour mission de « protéger le citoyen contre la ségrégation et d’imposer le droit contre le préjugé ». [3] La lutte contre les discriminations, qu’elles soient fondées sur le sexe, l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, un âge ou l’orientation sexuelle, fait donc aujourd’hui l’objet d’initiatives nationales et communautaires et se traduisent par des mesures législatives, des formes d’accompagnement des victimes, des opérations de sensibilisation de la population.

Et dans le cadre des opérations de sensibilisation de la population, la « Gay Pride » du 23 juin 2001, au slogan « Hétéros, Homos, tous ensemble contre les discriminations : parentalité, séjour, travail, couple », nous invite à nous arrêter sur les discriminations liées à l’orientation sexuelle. Car l’homophobie est devenue, depuis le vote du PACS (Pacte civil de solidarité), une véritable question de société.

En effet, il y a un an, en juin 2000, une disposition de la loi sur la présomption d’innocence est entrée en vigueur. Elle permet aux associations de lutte contre l’homophobie de se constituer partie civile en cas d’atteintes physiques ou matérielles, « lorsque ces faits ont été commis en raison du sexe ou des mœurs de la victime ».

Ce texte comporte cependant une limite : les associations ne pourront pas agir en cas d’injures ou de diffamation homophobes car ces délits n’existent toujours pas.

C’est pourquoi, les associations réclament l’ajout de l’expression « à raison de leur orientation sexuelle » dans l’article 225-1 du code pénal qui définit les motifs de discrimination (race, opinions, politiques, sexes). Alors que Martine Aubry affirmait « qu’il est de la responsabilité du gouvernement d’agir et de dire qu’il n’est pas acceptable de discriminer un homosexuel à l’embauche ou de refuser de louer un appartement à un couple homosexuel » et de sa responsabilité de « faire en sorte que la loi soit explicite » [4], alors qu’une directive européenne [5] s’impose à la France, que le Traité d’Amsterdam entend « combattre les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle », la Chancellerie oppose toujours à la demande des associations un « on va voir ». [6] Ainsi, les slogans tristement célèbres brandis par « les anti-PACS » à la manifestation du 31 janvier 1999 -« Les pédés au bûcher » ou « Pas de neveux pour les tantouzes »- pourront-ils être proclamés à nouveau en toute impunité. Et même si les associations de lutte contre l’homophobie dressent un constat de progrès pour l’année 2007, elles n’en restent pas moins en alerte : SOS-Homophobie [7], par sa Présidente Christine Le Doare, déclare toujours relever « une homophobie ordinaire avec son cortège de rumeurs, d’insultes, dans la rue, sur le lieu de travail ou en famille, puis une homophobie agressive faite de refus d’attribution de garde d’enfants... enfin une homophobie destructrice avec son lot d’agressions physiques... ». [8]
C’est pourquoi, les associations s’organisent pour obtenir l’adoption par les pouvoirs publics de plans de prévention, avec des actions de sensibilisation des structures et des personnels au contact du public, tels que les enseignants, les personnels hospitaliers, les agents des forces de l’ordre... « Éduquer, former, sensibiliser. Voilà les maîtres mots d’un programme qui permettrait aux futures générations d’apprendre à ne plus fonctionner sur le principe de l’exclusion, de la méfiance vis à vis de l’autre. Mais une telle ambition suppose des moyens ». [9] Et c’est parce que l’homophobie, au même titre que le racisme et le sexisme, compromet l’exigence d’égalité et de fraternité républicaine [10], et pour mettre en place les outils de prévention et de répression adaptés à sa lutte, que se tient le 9 juin 2001, avec le soutien des Verts, du PCF, du PS, de la CGT et en présence de nombreuses associations (DEGEL, APGL, CGL, GARE !...), le séminaire public de SOS-Homophobie intitulé « Discriminations et violences homophobes : l’inégalité au quotidien"

[1] Conférence de presse de Martine Aubry du 16 mai 2000.
[2] Le Groupement d’étude des discriminations, qui est composé de représentants de différents ministères et de syndicalistes, publie chaque année un rapport sur l’état des discriminations en France.
[3] Extrait de l’« Appel pour la création d’une instance contre la discrimination », signé en mars 2000 par le MRAP, la LICRA et la LDH.
[4] Juin 2000
[5] Les Résolutions européennes de 1994 et 1998 revendiquent l’égalité pour les gays et les lesbiennes et la Recommandation de 1997 combat les discours de haine.
[6] Libération du 23 juin 2000
[7] SOS-HOMOPHOBIE :
  Lien Hypertexte « http://www.France.qrd.org/assocs/sos »
  www.france.qrd.org/assocs/sos
  Ligne d’écoute : 01 48 06 42 41
[8] Extrait du « Rapport 2000 sur l’homophobie » réalisé par SOS-Homophobie
[9] Extrait du « Manifeste contre l’homophobie » de décembre 2000, notamment signé par AIDES, ACT-UP, CGL, SOS-HOMOPHOBIE, CRSH, CHICHE !
[10] Cf. Éditorial de Christine Le Doare, « Rapport 2000 sur l’homophobie » , Juin 2000

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